La première édition des 24 Heures de Daytona avec les prototypes DPi a permis à Cadillac de réussir un retour en endurance de la plus belle des façons. Les vainqueurs, le Wayne Taylor Racing, courraient après une victoire en Floride depuis des années. En GT, à Ford et Porsche les montres Rolex, avec comme d'habitude des écarts infimes à l'arrivée. Retour en détail sur les faits marquants.
Sommaire
- Un final tendu, une victoire attendue
- Cadillac revient en endurance de la plus belle des façons
- Jeff Gordon en invité super-star
- 21 périodes de neutralisation
- La nouvelle Porsche tient la distance
- Joey Hand, Dirk Muller et Sébastien Bourdais de nouveau vainqueurs
- L’adoption du règlement GT3 dynamite la catégorie GTD
Un final tendu, une victoire attendue
Comme bien souvent, les 24 Heures de Daytona se sont résumées, dans la plupart des catégories, à une course d’attente de 23 heures, avant un rush final, un sprint pour aller l’emporter dans la dernière heure. Pour la lutte au classement général, la bataille fut intense entre les deux Cadillac DPI de l’équipe Mustang Sampling Racing d’un côté, et Wayne Taylor Racing de l’autre.
L’équipe Mustang Sampling Racing (Action Express Racing en réalité) comptait sur le trio Joao Barbosa, Christian Fittipaldi et Filipe Albuquerque. Chez WTR, ce sont les frères Taylor et Max Angelelli, souvent associés, qui menaient la charge, avec comme quatrième larron un certain Jeff Gordon. La course fut intense. Les changements de position fréquents. Mais un final controversé vient désigner le vainqueur. Alors qu’il ne restait que 7 minutes de course, Filipe Albuquerque était en tête. Ricky Taylor, à l’aspiration sur la banking, se jette à l’intérieur du Turn 1. Il percute le portugais à l’arrière gauche, ce dernier part en tête à queue. Une manœuvre qui mérite une pénalité ? Oui, enfin, pas aux yeux de l’IMSA. Taylor continue et s’impose. « Je ne pilote pas de cette façon, pour être percuté comme cela. Il ne m’a pas attendu, il a filé. Un coup dans le dos, ce n’était pas un beau dépassement, je crois que tout le monde l’a vu » explique Filipe Albuquerque.
Pas de réaction des organisateurs… mais à 35 minutes du final, l’autre voiture de l’équipe Action Express Racing (n°31) avec Mike Conway semble avoir bloqué intentionnellement la Cadillac de Ricky Taylor, le retardant lors d’un restart. Faut-il y voir donc une forme d’équilibre de la part des commissaires ? Comme souvent en tout cas, les décisions aux Etats-Unis (ou leur absence) sont source de contestation. Un phénomène moins présent en Europe et notamment aux 24 Heures du Mans.
Derrière les deux Cadillac, la voiture de l’équipe Visit Florida Racing Multimatic/Riley LM P2 complète le podium, tandis que la première Nissan DPi est quatrième, à trois tours. Les Mazda, que l’on attendait enfin compétitives, sont plus décevantes que jamais. Alors que par le passé, l’engagement de Mazda se faisait avec des châssis Lola vieillissant, l’arrivée de la catégorie DPI donnait de sérieux espoirs de voir la marque aux avant-postes. Les deux prototypes sont 40e et 46e, avec des soucis de transmissions et des départs de feu… Chez Rebellion, des soucis électriques privent l'équipe suisse d'un bon résultat...
Cadillac revient en endurance de la plus belle des façons
La victoire de l’équipe Wayne Taylor Racing, bien qu’acquise après un final discutable, vient récompenser la fidélité des pilotes aux 24 Heures de Daytona. « Nous sommes passés si proches de la victoire à de trop nombreuses reprises » explique Jordan Taylor. Deuxièmes en 2014 et 2016 notamment, les frères Taylor tiennent leur premier succès à domicile, qui devrait en appeler d’autres dans les années à venir. En tête pendant 358 des 659 tours de l’épreuve, l’équipe Wayne Taylor Racing a dominé cette édition sur le plan mathématique… mais la manière manque. L'Histoire retiendra tout de même que Cadillac, pour son retour en endurance dans la catégorie prototype, gagne dès sa première course. La marque américaine avait déserté le monde de l'endurance depuis la fin de l'année 2002. Les Cadillac CTS-V engagés en GT dans des championnats américains n'ont jamais eu vocation à venir un jour dans des séries "Le Mans".
Mais avec ce succès majeur, Cadillac revient de fort belle manière. Les Cadillac DPi ont dominé la 55e édition des 24 Heures de Daytona, au point qu'on regrette de ne pas pouvoir les voir en Sarthe (le règlement impose que les DPi retrouvent leur aérodynamique d'origine, et un moteur unique (Gibson) pour les 24 Heures du Mans). Peut-être que cette victoire, et d'autres succès à venir (Sebring ? Petit Le Mans ?) vont inciter l'état major du constructeur à considérer un programme en LM P1... Cadillac et les 24 Heures du Mans, c'est une histoire inachevée, comme nous vous l'avons raconté sur Endurance Magazine : "Cadillac aux 24 Heures du Mans : 2000, du neuf avec du vieux !", "Cadillac aux 24 Heures du Mans : 2001, mascara et blush", "Cadillac aux 24 Heures du Mans : 2002, un an trop tard !".
Jeff Gordon en invité super-star
La présence de la star de la Nascar Jeff Gordon au départ des 24 Heures de Daytona était à la fois un phénomène médiatique mais aussi un phénomène sportif. L’américain avait déjà pris le départ de l’épreuve en 2007, mais le voir revenir, dans une voiture capable de l’emporter (et qui l’a emporté) était un véritable événement, pas de doute là-dessus. Loin de nous donc l’idée de minimiser sa performance, mais le pilote Nascar n’a pris le volant que deux petites heures (2 heures, 5 minutes plus précisément), ce qui est assez loin des 8 heures et 12 minutes de Ricky Taylor, ou encore des 6 heures 48 minutes et 6 heures 36 minutes de Jordan Taylor et Max Angelelli.
Jeff Gordon fut aussi le « plus lent » des quatre pilotes de la Cadillac n°10. Son meilleur chrono est un 1’37’’643, tandis que les trois autres pilotes ont signé leur meilleur temps en moins de 1’37.
21 périodes de neutralisation
La course dura 24 heures, et pourtant, pour les pilotes comme les spectateurs, la nuit fut une éternité. Avec 12 heures de pluie consécutives, pendant la nuit déjà longue en Floride, la première course d’endurance majeure de l’année a tourné à un parcours du combattant. Au total, on compte 21 périodes de neutralisation pendant cette course. Pas surprenant donc que le meilleur temps au tour n’ait plus évolué peu après la cinquième heure de course. Filipe Albuquerque, avec un 1’36’’269 reste le plus rapide en course.
Depuis le départ jusqu’à ce tour de Filipe Albuquerque, ce sont toujours des Cadillac DPi qui étaient détentrices de ce « titre » de voiture la plus rapide. Les trois Cadillac DPi ont tenu ce rôle, avec notamment Joao Barbosa signant le meilleur tour quatre fois de suite lors des quatre premiers tours. On remarque que Filipe Albuquerque fut aussi l’homme le plus rapide en terme de vitesse de pointe en course : 317,85 km/h sur le banking, devant Dane Cameron et Jeff Gordon, bien habitué aux lieux à vitesse élevée.
Avec 659 tours, soit 3 775,41 kilomètres couverts, la voiture victorieuse est loin de la distance de 2016 (736 tours, soit 4 216,54 kilomètres). Mais la présence de la pluie pendant ces 24 heures explique en grande partie ce résultat, avec les 21 neutralisations ne permettant pas aux pilotes de s’exprimer pleinement. A titre de comparaison, un peu tirée par les cheveux certes, l’Audi R8 qui a remporté les 24 Heures du Mans 2001, édition marquée par la pluie, avait parcouru 4 381,65 kilomètres en 24 heures. La McLaren F1 victorieuse en 1995, année là aussi marquée par la pluie au Mans, couvrait tout de même 4 055,80 km…
La nouvelle Porsche tient la distance
La grande nouveauté de la catégorie GTLM de ces 24 Heures de Daytona était la Porsche 911 RSR. Elle peut vous sembler familière, mais la nouvelle 911 dispose désormais d’un moteur en position centrale, et non en porte-à-faux arrière (central arrière) ce qui est une première pour une 911 dans cette catégorie. La n°911 se classe à la deuxième place à l’issue de 24 heures de course, à moins de trois secondes de la Ford victorieuse. Difficile d’en tirer des conclusions sur les performances de la Porsche en se fiant uniquement à cet écart sur la ligne d’arrivée, tant la course a été marquée par les neutralisations.
En regardant les temps au tour en course, on s’aperçoit que Dirk Werner, sur la n°911, est le plus rapide des pilotes GTLM non-Ford, en 1’43’’543. Avec Fred Makowiecki et Patrick Pilet, ses équipiers, il est passé sous la barre des 1’44 au tour. Une barre que Kevin Estre passe (1’43’’979) mais pas Laurens Vanthoor ni Richard Lietz. A titre de comparaison, jamais une BMW M6 GTLM ne fut chronométrée en dessous de ces 1’44 au tour. La nouvelle Porsche est donc bien née, mais les Ford semblent encore avantagées... L'équilibre des performances en vue des 24 Heures du Mans promet de longues nuits blanches aux organisateurs.
Joey Hand, Dirk Muller et Sébastien Bourdais de nouveau vainqueurs
Après la victoire en catégorie LM GTE Pro aux 24 Heures du Mans 2016, la Ford GT décroche à Daytona sa deuxième victoire majeure sur la scène internationale. Les victoires à Fuji et Shanghai en Championnat du Monde d’Endurance l’an dernier sont certes importantes, mais n’ont pas la même portée que ce triomphe sur le sol américain. Pour l’emporter, Ford avait misé gros. Alors qu’en 2016, pour leurs débuts en compétition, seules deux Ford GT étaient présentes, ce sont cette année quatre exemplaires qui étaient alignés. Une démonstration de force payante, avec la victoire de Joey Hand, Dirk Muller et Sébastien Bourdais, qui connaissent tous les trois parfaitement le tracé. Le Manceau a d’ailleurs confié que les trois pilotes ont été raisonnables pendant la course. « Nous n’avons pas mis une roue au mauvais endroit, et cela a payé ». Idem pour son équipier Joey Hand « La voiture est dans un état de saleté très avancé, mais elle n’a pas une seule égratignure ». A noter que 75 changements de leader ont eu lieu en GTLM.
Peu de changement à signaler chez Ford en matière d’organisation. Tony Kanaan a fait son apparition à la place de Marino Franchitti, pour épauler Harry Tincknell et Andy Priaulx. La numérotation des voitures a été modifiée. L’équipage de la n°66 a basculé sur la n°68. Celui de la n°67 sur la n°69. Celui de la n°68 sur la n°66, et enfin celui de la n°69 sur la n°67. En clair, le Ford Chip Ganassi Team UK prend les numéros les plus élevés (68 et 69) alors que l’entité américaine (Ford Chip Ganassi Team USA) prend les numéros les plus petits (66 et 67). Un changement purement marketing ? Sans doute, à moins qu’une hiérarchie se dessine au sein des équipages… Difficile à percevoir en tout cas en regardant les performances des pilotes. Tous se tiennent en moins d’une seconde sur un tour. Richard Westbrook (1’43’’385), Ryan Briscoe (1’43’’433) et Tony Kanaan (1’43’’453) furent les plus rapides. Billy Johnson, un temps évoqué sur le départ de l’équipe Ford à l’inter-saison, est le moins rapide : 1’44’’257.
L’adoption du règlement GT3 dynamite la catégorie GTD
Il y avait de la nouveauté en catégorie GTD. La « petite » catégorie du GT aux Etats-Unis est ouverte désormais aux voitures qui répondent aux règles du GT3, et l’intérêt des constructeurs s’est fait sentir. La preuve, Mercedes était là avec des AMG GT3, tout comme Lexus avec des RC F GT3 et Acura, avec la toute nouvelle NSX GT3. De la nouveauté, mais c’est une bonne vieille Porsche 911 GT3 qui s’impose, avec Carlos de Quesada, son fils Michael, Jesse Lazare, Daniel Morad et Michael Christensen.
Un équipage qui n’était pas vraiment dans les favoris. Si Christensen est un pilote officiel Porsche, Michael de Quesada, Jesse Lazare et Daniel Morad sont issus de la Porsche GT3 Cup Challenge… pas vraiment le premier choix avant le départ donc, mais une course solide leur permet de s’imposer. Notre préférence allait à l’Audi R8 LMS GT3 de Christopher Mies, Jules Gounon, Connor De Phillippi et Jeffery Schmidt, qui terminent finalement à la deuxième place à seulement 0.293 secondes de la Porsche. Une Mercedes complète le podium, la n°33 du Riley Motorsports-Team AMG avec Ben Keating, Jeroen Bleekemolen, Mario Farnbacher et Adam Christodoulou.
Résultats des 24 Heures de Daytona 2017
Classement Prototype
- Taylor / J. Taylor / M. Angelelli / J. Gordon
Konica Minolta Cadillac
Cadillac DPi - Barbosa / C. Fittipaldi / F. Albuquerque
Mustang Sampling Racing
Cadillac DPi - Goossens / R. Van Der Zande / R. Rast
VisitFlorida Racing
Multimatic/Riley
Classement PC
- French / P. O'Ward / K. Masson / N. Boulle
Performance Tech Motorsports
ORECA FLM09 - Papadopoulos / J. Mowlem / A. Merzon / T. Hindman / D. Cheng
BAR1 Motorsports
ORECA FLM09 - Yount / B. Rice / M. Kvamme / C. Ducote / G. Yacaman
BAR1 Motorsports
ORECA FLM09
Classement GTLM
- Mueller / J. Hand / S. Bourdais
Ford Chip Ganassi Racing
Ford GT - Pilet / D. Werner / F. Makowiecki
Porsche GT Team
Porsche 911 RSR - Fisichella / J. Calado / T. Vilander
Risi Competizione
Ferrari 488 GTE
Classement GTD
- de Quesada / D. Morad / J. Lazare / M. de Quesada / M. Christensen
Alegra Motorsports
Porsche 911 GT3 R - De Phillippi / C. Mies / J. Gounon / J. Schmidt
Montaplast by Land-Motorsport
Audi R8 LMS GT3 - Keating / J. Bleekemolen / M. Farnbacher / A. Christodoulou
Riley Motorsports - Team AMG
Mercedes - AMG GT3