Après une première participation en 1991 décevante, Peugeot a décidé de revenir en 1992… en ne laissant rien au hasard. Ainsi, aussitôt la saison 1991 terminée, direction le circuit Paul Ricard pour un test d’endurance. A la fin-novembre, la 905 apparaît plus racée que jamais, et optimisée pour Le Mans. Peugeot Talbot Sport dépêche en effet sur place une voiture en configuration 24 Heures du Mans.
L’aileron placé à l’avant en fin de saison 1991 disparait. Le but ? Enlever de l’appui, et permettre à la 905 de gagner en vitesse de pointe dans les Hunaudières. Tout est fait lors de ce test de novembre pour « coller » à la réalité des 24 Heures du Mans. Les rapports de boite sont ceux pensés pour le circuit de la Sarthe, le régime moteur maximum est abaissé. Un nouvel embrayage et une nouvelle boite de vitesses sont implantés. Un nouveau souffle pour la Peugeot 905 ? Non. Le marathon de 24 heures contre le bitume varois se termine avec deux boites cassées, une transmission touchée et un moteur en moins. Il y a du boulot.
Les essais vont se multiplier pendant l’hiver, au Paul Ricard mais aussi à Magny-Cours. Le début de saison 1992 est abordé de manière fébrile. A Monza, premier rendez-vous du Championnat du Monde pour Voitures de Sport, la Peugeot 905 manque une victoire pourtant promise. La voiture de Mauro Baldi et Philippe Alliot est contrainte à l’abandon, moteur cassé, tandis que Yannick Dalmas sort de la piste dans le dernier tour et se retrouve sur le toit. Victoire Toyota, avec seulement trois voitures qui passent le drapeau à damiers sur 11 au départ.
A Silverstone, deuxième manche de la saison, Alliot et Baldi sont encore victimes de leur moteur, tandis que Derek Warwick et Yannick Dalmas l’emportent.
Pour les 24 Heures du Mans, Peugeot prévoir large. Trois châssis sont engagés (avec les n°1, n°2 et n°31) tandis que trois autres châssis sont là en guise de mulets. En matière de pièces détachées, les stands Peugeot ressemblent à une vraie concession : trois boites de vitesses, trois demis-trains et trois ensembles de freinage complets sont prévus par voiture.
La campagne 1992 sera parfaite, ou presque. Victoire et troisième place, un beau succès alors que la concurrence, Toyota en premier n’a pas démérité. Dès les essais, les Peugeot pointent devant. Philippe Alliot fait le spectacle le mercredi des essais, avec un 3’21’’209 qui impressionne les observateurs, balayant de plus de cinq secondes le précédent record sur le circuit, signé par Nissan. La 905 avale la ligne droite des Hunaudières très vite, et est flashée à 351 km/h (avant Indianapolis) !
En course, les premiers tours de roues sont difficiles. La pluie s’invite, pour la première fois depuis plus d’une décennie au Mans. La Peugeot 905 n°31, avec Alain Ferté au volant, entre en contact avec une Toyota à l’amorce des Hunaudières. Surpris par la pluie et la vitesse réduite de la voiture japonaise, il la percute et mettra dix minutes pour rentrer au stand. 45 minutes pour réparer, la course à la victoire est terminée, 11 tours de retard. La voiture abandonnera le lendemain, à 7h45, casse moteur.
Les Peugeot 905 n°1 et n°2 vont, elles, tenir leur rang. Au petit matin, la n°1 de Warwick, Dalmas et Blundell compte deux boucles d’avance sur la n°2 de Baldi, Alliot et Jabouille. Un doublé idéal. Mais Philippe Alliot va multiplier les erreurs : deux sorties de piste (rupture de pompe de direction assistée puis d’un cardan de commande de boite). Du temps perdu sur la piste à cause ce ces défaillances, mais notamment aux stands, avec un changement de plaquettes de frein, de disques, ou encore de pompe de direction assistée. La Peugeot 905 n°2 passe à 6 tours de la voiture sœur. Autant de changements qui permettent à la Toyota de Raphanel, Sekita et Acheson de prendre la deuxième place.
Voilà que la n°1 aussi rencontre des soucis : au ralenti, avec Derek Warwick au volant, la voiture de tête doit changer de disques et plaquettes peu avant 9h00, tandis que l’allumage est surveillé, et le boitier électronique est remplacé. La voiture s'impose finalement, victoire Peugeot. Les soucis techniques n'ont pas épargné les voitures. Peugeot partait avec un avantage, celui d'avoir déjà roulé en 1991 avec les contraintes réglementaires exigées au Mans . Une année d'avance, qui a permis aux hommes de Peugeot de faire la différence, et de priver Toyota d'un succès.
En 1992, Renault n'est plus le seul constructeur majeur et encore en activité français au palmarès ! Peugeot aussi peut se vanter d'avoir décroché Le Mans.
Crédit photo : Martin Lee et Dan Morgan avec autorisation pour Endurance Magazine