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Nissan R391, au crépuscule d'un prototype victorieux


Après une édition 1998 des 24 Heures du Mans plutôt encourageante pour Nissan avec la légendaire R390 GT1, le constructeur japonais se présente à l’édition 1999 plein d’espoirs. Mais suite à un changement de réglementation dans la catégorie GT1 (qui devient LMGTP) Nissan préfère se tourner vers la catégorie LMP. Un choix qui donnera naissance à l’un des prototypes d’usines les plus méconnus : la Nissan R391.

Changement de règles

Après les 24 Heures du Mans 1998, l’Automobile Club de l’Ouest (ACO), voyant que les constructeurs contournent par tous les moyens les règles d’homologation imposées, décide purement et simplement de supprimer la catégorie GT1.

Suppression certes, mais tout en laissant les constructeurs déjà engagés en GT1 se battre dans une nouvelle catégorie nommée LMGTP (Le Mans Grand Tourisme Prototype).

Ces voitures, après quelques petites modifications demandées par l’ACO, étaient enfin considérées comme des prototypes.

La différence avec les LMP (Le Mans Prototype) était que leurs cockpits étaient fermés.

Parmi tous les constructeurs présents avec ces « protos » à l’édition 1999 des 24 Heures du Mans, plusieurs approches possibles : tenter de rester dans la même catégorie que l’année précédente, comme BMW en LMP, engager une voiture dans les deux catégories comme Audi, ou encore prendre le pari de changer de catégorie, comme Panoz et surtout
Nissan.

Le retour d’un vrai prototype Nissan

Nissan abandonne donc sa R390 GT1 dont quatre exemplaires ont terminé dans le top 10 du général en 1998 pour développer une nouvelle voiture pour la catégorie LMP, estimant que cette dernière serait plus performante qu’une GT1 évoluée. Il s’agit là du premier vrai prototype du constructeur nippon au Mans depuis la R90CK en 1990 qui avait clôturée l’épopée sans victoire commencée en 1986 en groupe C.

C’est ainsi que la Nissan R391 fut développée, la conception étant confiée à G-Force Technologies. En ce qui concerne le moteur, le constructeur japonais ne réutilise pas le V8 bi-turbo de 3,5 litres de la R390 préférant passer à un moteur à aspiration naturelle, la perte des turbos étant compensée par un V8 5 litres.

Courage Compétition passe un accord pour récupérer le moteur de la Nissan GT1 et le greffe dans un prototype
Courage Compétition passe un accord pour récupérer le moteur de la Nissan GT1 et le greffe dans un prototype

De plus, Nissan trouve un accord avec Courage Compétition pour la fourniture de moteurs 3,5 litres bi-turbo de la R390 en
échange d’un retour technique et de l’achat et de l’exploitation d’une C52 sous la bannière Nissan Motorsports, histoire d’avoir une voiture à l’arrivée si jamais les deux R391 engagées n’arrivaient pas à voir le bout de la classique mancelle.

La désillusion

Nissan se présente aux 24 Heures du Mans 1999 avec trois voitures : deux R391, la #22 menée par le trio Michael Krumm/Satoshi Motoyama/Erik Comas et la #23 par Aguri Suzuki/Masami Kageyama/Eric van de Poele. On retrouve enfin la Courage C52 #21 pilotée par Didier Cottaz/Marc Goossens/Frederik Ekblom.

Les premiers essais sont encourageants, les deux prototypes japonais accrochent les 10e et 13e temps devant les Mercedes CLR #5 et #6 et, les deux R8C de chez Audi. Les Nissan se payent même le luxe de finir devant la voiture qui allait devenir la gagnante cette édition 99, la V12 LMR #15.

Mais les qualifications amorcèrent le début de la désillusion quand la #23 pilotée par van de Poele frappa le mur de plein fouet au virage du Tertre Rouge lors de la première séance suite à un outil oublié à l’intérieur empêchant les freins de fonctionner correctement.

La voiture irréparable pour la course, van de Poele partait lui à l’hôpital avec une vertèbre fracturée, Nissan ne pouvait plus compter que sur la #22 qui, lors de la deuxième séance de qualification, signa comme meilleur temps un 3'36''043 la plaçant en 12e place à plus de six secondes de la GT-One #1 en pole.

La course commença plutôt bien puisque le prototype restant, au bout de 6 heures, occupa la 4e place, devancé seulement par les deux V12 LMR et la GT-One #2. Mais au bout de huit heures de course un problème de faisceau électrique annihila toutes les chances de la #22 de bien figurer. Cette panne étant tellement importante que la voiture resta bloquée aux virages Porsche et abandonna après seulement 110 tours.

Ironie du sort, la seul voiture restante - et qui termina la course - fut la Courage C52, qui plus est à une honorable 8e place au général après que la voiture se soit qualifiée 16e . De quoi laisser un goût amer chez Nissan concernant leurs propres voitures qui pouvaient espérer tellement mieux.

Plus tard dans la saison 1999 le constructeur nippon pris part aux 1000km de Fuji, épreuve coorganisée par l’ACO et la JAF (Japan Automobile Association). Les constructeurs européens n’ayant pas pris la peine de faire le déplacement, Nissan ne se
retrouvait pourtant pas sans adversaire car Toyota, avec une GT-One engagée, était l’ennemi à abattre. Surprise, victoire ! La R391 coupa la ligne en première place avec même un tour d’avance sur la GT-One.

Une trop courte carrière

Cette victoire à Fuji donna automatiquement une invitation aux 24 Heures du Mans 2000 à Nissan. Invitation, qui ne sera pas utilisée car les hauts responsables de la marque décidèrent de couper subitement les différents programmes (excepté le JGTC) en sport auto estimant que ce dernier ne valait plus le coût financièrement, qui plus est avec à sa tête un nouveau dirigeant qui avait pour objectif de faire le plus d’économie possible : Carlos Ghosn.

Cette décision des hauts dirigeants marqua la fin du programme en endurance, programme qui ne reviendra que seize ans plus tard avec la fameuse GT-R LM Nismo et le succès qu’on lui connaît…

LE MANS, France (May 31, 2015) – Nissan today completed an extensive test program at Le Mans during the official test day. The three Nissan GT-R LM NISMOs were the first cars on track when the morning session went green, ready to work through a comprehensive test program to dial the cars into the unique Le Mans circuit.

Finalement, la R391 avait le potentiel pour espérer les places d’honneurs voire peut être de rivaliser avec Audi et pourquoi pas escompter une victoire au Mans. Le choix de passer du GT1 au LMP fut le bon.

Crédit photo : Jacques Vivier / Nissan

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