2021 marque les grands débuts de la catégorie Hypercar aux 24 Heures du Mans. Après trois premiers affrontements à Spa-Francorchamps, Portimao puis Monza, on a déjà pu voir une hiérarchie s’établir. Toyota a remporté les trois premières courses de la saison du Championnat du Monde d’Endurance avec Alpine dans l’ombre. Les SCG 007 LMH de la Scuderia Cameron Glickenhaus, elles, n’ont bénéficié que d’une préparation partielle. Dans ce contexte, on voit mal comment une quatrième couronne pourrait échapper au constructeur nippon. Mais Le Mans reste une course imprévisible. Endurance Magazine évoque les grands enjeux de cette 89e édition.
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Toyota vraiment imbattable ?
Trois victoires de rang depuis 2018 au Mans, deux titres constructeur en 2018-2019 et 2019-2020 en WEC, autant de titres pilotes pour Fernando Alonso, Sébastien Buemi et Kazuki Nakajima d’abord puis Mike Conway, Kamui Kobayashi et José María López, c’est peu de dire que Toyota marche sur l’endurance prototype depuis plusieurs saisons maintenant. On a pu reprocher au constructeur de vaincre sans péril, mais la marque japonaise est restée fidèle à une discipline qui a connu des heures difficiles, et qui entame aujourd’hui sa renaissance. 2021 est une année de transition. Les LMP1 rangées au garage, place aux Hypercars.
Toyota possède l’avantage d’avoir dégainé en premier sa création, la GR 010 Hybrid. Une TS050 Hybrid à peine déguisée ? Non. Contrairement aux évolutions réglementaires précédentes qui ont permis à Toyota de capitaliser sur chaque voiture pour sortir une nouvelle itération (la TS030 Hybrid en 2012 et 2013, suivie de la TS040 Hybrid en 2014 et 2015 et enfin la TS050 Hybrid de 2016 à 2020), c’est d’une page blanche que sont repartis les ingénieurs pour la GR010 Hybrid. Certes, l’expérience acquise depuis maintenant près de 10 ans a servi et se traduit par une ligne qui évoque directement les prototypes LMP1. Pas surprenant car la gestation de la GR010 Hybrid remonte précisément à l’époque où le règlement évoquait la possibilité de développer une Hypercar dérivée d’un modèle de série, ou sous la forme d’un prototype pur et dur. Depuis, face à un engouement réduit et à des discussions avec de nombreux constructeurs, la ligne de conduite a été revue. Mais cette Toyota porte en elle, peut-être, une vision très (trop ?) précoce du règlement. La présentation de la Peugeot 9X8 suffit à la rendre datée, alors qu’elle n’a pas encore pris part à ses premières 24 Heures du Mans. Paradoxal. La GR010 Hybrid est celle qui est sur le papier déjà victorieuse de cette édition. Un statut que Toyota a déjà su faire changer par le passé...
Alpine, une « Hypercar » de transition avant un projet complet ?
Il se murmure que la marque Alpine va prolonger son engagement au sommet de l’endurance avec un programme complet. La R13 Rebellion rebadgée cette année est “tolérée”, ou plutôt invitée avec plaisir car l’organisateur sait que le plateau est un peu maigre pour la lutte au général. Alpine a longtemps eu le droit de rester en LMP2, malgré son statut de constructeur officiel. Désormais, il est temps de faire la bascule. 2021 est une véritable année de transition, avec peut-être 2022 pour continuer de faire rouler cette ancienne LMP1… qui pourrait servir de véritable mulet pour l’acquisition de données. Après tout, si une Hypercar arrive (LMH ou LMDh), chaque instant en piste est bon à exploiter.
L’exploit est-il possible ? Oui. Il suffit de voir la pole position décrochée lors de la manche portugaise mais aussi la présence répétée sur le podium depuis le début de la saison. Une victoire française n’est pas si improbable, d’autant qu’Alpine a eu le droit il y a peu à son premier succès en Formule 1 avec Esteban Ocon au volant. L’alignement des planètes semble bon actuellement pour la marque française.
Et si la surprise venait des Etats-Unis ?
Jim Glickenhaus apporte de l’exotisme à ce plateau Hypercar 2021. L’ancien producteur de cinéma est engagé depuis de nombreuses années en endurance et notamment dans les courses qui se déroulent sur le Nürburgring. Mais ce programme Hypercar est d’une ampleur bien plus forte. Lui qui aime les belles italiennes (notamment Ferrari), et qui a été bercé par les exploits de Briggs Cunningham, veut croire en une fable moderne. Celle du pirate, de l’équipe avec des moyens réduits qui tient le match face à un grand constructeur. Panoz en a rêvé il y a maintenant 25 ans et est venu se frotter aux plus grands constructeurs.
Glickenhaus ambitionne de faire de même, et mieux. La victoire ? Elle semble difficile à obtenir lors de la première année du programme, malgré des moyens humains importants. La qualité des équipages est réelle, la volonté de bien faire aussi. Les SCG 007 LMH devraient souffrir de problèmes de jeunesse sur une piste qu’elles n’ont jamais fréquenté. Logique. On ne croit pas à la victoire tout de suite, mais 2022 sera une opportunité à saisir si le programme se poursuit.