WEC : le retrait de Porsche, signe que les lignes sont en train de bouger ?

L’annonce du retrait de Porsche du WEC, pour se focaliser uniquement en endurance sur le championnat IMSA, et continuer son engagement en Formula E, était attendue. Depuis des mois, avant même l’édition 2025 des 24 Heures du Mans, les rumeurs en coulissent se multipliaient.

Soupçon de rapprochement de Roger Penske avec Ford, qui va débarquer en endurance en 2027 et pourrait avoir besoin d’une équipe d’exploitation. Soupçon de lassitude de l’état-major de la marque, qui court sans succès après Le Mans depuis trois éditions, et qui tombe face au rival Ferrari. Soupçon enfin de gestion moins rigoureuse que par le passé dans ce programme, avec dès le départ un choix contestable de recourir au LMDh, en mobilisant peu les connaissances issues du récent programme 919 triplement couronné au Mans.

Un retrait majeur

Si les retraits de Glickenhaus, Vanwall ou Isotta Franschini, et la disparition quasiment actée de Lamborghini, émeuvent les plus passionnés, la « coupe » que vient de réaliser Porsche est plus franche. Plus forte. La marque est éminemment bien plus liée à l’endurance prototype. Porsche, c’est le record de victoires en Sarthe ou à Daytona (19 à chaque fois) ou à Sebring (18 succès). Porsche, c’est une lignée de prototypes qui ont gagné partout sur la planète, de la 917 qui a lancé l’épopée aux 956, 962 et 919. L’annonce de cette mise en pause de la campagne WEC est un mauvais signal si on le prend de manière brute. Mais il pourrait en réalité être le point de départ d’un recalibrage pertinent. La fondation d’un retour au sommet ?

Désormais, en endurance, pour voir des 963, il va probablement falloir se contenter de l’IMSA. Il n’est pour l’heure pas précisé quels seront les plans de Proton Competition en WEC, qui n’a jamais eu de second châssis entre les mains. La règle impose désormais au moins deux voitures par constructeur dans le championnat. Sans cela, l’engagement sera refusé. Si Porsche s’impose au Petit Le Mans ce week-end et décroche une invitation au Mans, il faudra que deux exemplaires soient en WEC pour l’honorer. Et, d’ailleurs, que va-t-il advenir des 911 en LMGT3 ? Sans présence en Hypercar, la règle voudrait qu’elles ne soient plus admises.

Un focus donc se dessine sur les Etats-Unis, pour économiser une ligne de budget importante. Porsche est en crise : ventes en baisse, bénéfice en chute libre, il fallait un geste du côté sportif pour économiser, et a minima montrer un visage cohérent d’entreprise qui a conscience de sa situation. Le WEC a sauté. Peu importe.

En faisant cela, Porsche condamne peut-être ses chances de participer aux 24 Heures du Mans 2026 (comme l’a été contraint Lamborghini en 2025), mais c’est peut-être une respiration bienvenue qui s’ouvre.

Le début est la fin

Le WEC va accueillir Genesis en 2026, puis Ford et McLaren dans la foulée. Tous, tous, avec des LMDh. Cette formule est celle qui fonctionne. On peut le regretter, mais aujourd’hui, les LMDh font le nombre. Porsche a choisi cette voie d’ailleurs, faisant partie des constructeurs poussant à changer le règlement, et à amener à cette cohabitation LMDh/LMH si problématique. Peugeot, et Toyota, en ont payé les frais. Les LMDh garnissent les grilles, mais ne gagnent pas en Sarthe. Cette situation pourrait évoluer en 2026, mais la question de l’après est réelle : combien de temps peut-on, encore, faire exister ensemble LMDh et LMH, dont on a tant de mal à balancer les performances ? En coulisse, on l’imagine, les officiels ont envie de simplifier les règles du jeu, car qui est heureux de la situation actuelle, BoP-dépendante ?

J’ai le sentiment qu’une réglementation unique, sorte de jonction entre LMH et LMDh, va arriver pour la période 2030. Peut-être pourrions-nous avoir une ouverture du LMDh, moins restrictif, et la disparition de la liberté totale du LMH. Où je veux en venir ?

Les concurrents qui vont arriver à partir de 2026 sont pour moi dans le mauvais wagon, et vont se heurter à ces tractations lancées depuis l’été. J’ai du mal à envisager Genesis, Ford ou McLaren briller dès leurs premières sorties avec leurs LMDh. En revanche, et si cette « convergence » nouvelle se matérialise, rapidement, un nouvel essor, avec une base moins sujette à controverse, peut émerger. Et Porsche, en prenant du recul dès aujourd’hui, pourrait alors à nouveau lancer un projet et s’impliquer. Peut-être aussi que ce retrait est le signe que les lignes ont bougé, que les discussions ont abouti vers de nouvelles règles comme je l'évoque. Et si, Porsche, avait agit en réaction, pour mieux préparer la reconquête ?

En clair, le retrait annoncé l’est, sans doute, pour des raisons financières justifiables. C’est aussi, sur le plan sportif, un moyen de prendre de la hauteur pour attendre qu’une nouvelle direction soit donnée. Et, alors, Porsche pourrait en être. La marque n’a pas – à l’exception du LMP900/LMP1 non-hybride – loupé une épopée majeure depuis les années 70.

Crédit photo : Porsche

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