La 93ème édition des 24 Heures du Mans, qui se tiendra du 11 au 15 juin 2025, réserve un rendez-vous particulier pour Porsche. Avec 19 victoires à son compteur, le constructeur allemand détient certes le record absolu de succès dans la Sarthe, mais sa dernière consécration remonte déjà à 2017 avec la 919 Hybrid. Huit ans plus tard, la marque de Stuttgart espère renouer avec la victoire grâce à sa Porsche 963, un prototype LMDh qui divise autant qu'il passionne. Si elle a brillé outre-Atlantique avec des succès retentissants à Daytona et Sebring, l'Hypercar allemande peine encore à s'imposer en Europe. Cette édition 2025 pourrait-elle marquer l'avènement définitif de la 963 dans le panthéon des légendes mancelles ?
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La 963 encore en quête de reconnaissance
La Porsche 963 n'a pas choisi son nom par hasard. En s'inscrivant dans la continuité numérique de la mythique 962, victorieuse au Mans en 1986 et 1987, elle assume pleinement l'héritage d'une époque dorée du sport automobile. Cette filiation n'est pas qu'esthétique : comme sa glorieuse aînée, la 963 évolue simultanément en championnat américain IMSA et en Championnat du monde d'endurance, portée par la même structure Penske.

Mécaniquement, la 963 puise dans le patrimoine technique de Porsche avec un V8 bi-turbo de 4,6 litres dérivé de celui qui équipait déjà la 918 Spyder et les prototypes RS Spyder ayant couru au Mans dans les années 2000. Cette architecture « hot-V », où les turbocompresseurs sont placés entre les rangées de cylindres, offre une compacité remarquable et un centre de gravité abaissé, autant d'atouts théoriques pour affronter les 13,626 kilomètres du circuit de la Sarthe. Tous les détails sont à retrouver sur le site officiel des 24 Heures du Mans, avec l'article "La Porsche 963 à la loupe : une Hypercar pour conquérir une 20ᵉ victoire".
Pourtant, malgré ce pedigree technique et historique, la 963 reste à ce jour la grande absente du palmarès manceau. Ses deux tentatives précédentes se sont soldées par des résultats mitigés : une modeste 16ème place en 2023 lors de ses débuts, puis une frustrante 4ème position en 2024 malgré l'obtention de la première Hyperpole de l'ère moderne pour Porsche. Cette irrégularité chronique et cette sensibilité aux variations de l'équilibrage des performances (BoP) constituent aujourd'hui les principales faiblesses de la machine allemande.
L'armada Porsche : quatre chances pour un rêve de vingtième victoire
Pour cette édition 2025, Porsche mise sur la stratégie du nombre avec pas moins de quatre 963 au départ. Trois prototypes officiels Porsche Penske Motorsport rejoints par une quatrième machine confiée à l'équipe cliente Proton Competition.
Les équipages officiels allient expérience et renouvellement générationnel. La voiture #5 associe le Danois Michael Christensen au Français Julien Andlauer, ancien Porsche Junior fraîchement promu, épaulés par Mathieu Jaminet pour l'épreuve mancelle. Sur la #6, les champions du monde en titre Kévin Estre et Laurens Vanthoor font équipe avec l'Australien Matt Campbell. Enfin, la #4 confie ses espoirs au duo IMSA Felipe Nasr-Nick Tandy, renforcé par Pascal Wehrlein, champion du monde de Formule E.

Cette richesse humaine constitue indéniablement l'un des atouts majeurs de Porsche. Les équipages ne manquent pas d'expérience ni de palmarès au Mans, tout en s'étant quelque peu renouvelés avec une once de fraîcheur et de jeunesse. Kévin Estre, notamment, a prouvé l'an dernier sa capacité à extraire le meilleur de la 963 en signant un tour de qualification époustouflant en 3'24''634.

Mais cette force apparente cache également une faiblesse : un début de saison 2025 inquiétant où l'on n'a jamais vraiment vu l'écurie venir se mêler aux premières places, pointant même à une décevante sixième place au championnat constructeurs WEC.
Le défi Ferrari et l'ombre des rivaux
Face à Porsche se dresse une concurrence impitoyable, menée par Ferrari qui domine outrageusement cette saison 2025. La marque au cheval cabré, tenante du titre, a remporté les trois premières manches de la saison, transformant sa 499P en véritable épouvantail pour l'ensemble du plateau Hypercar.
Toyota, éternel rival de Porsche dans l'art de gagner au Mans, guette également la moindre faille allemande. Les GR010 Hybrid nippones, fortes de leur expérience et de leur fiabilité légendaire, constituent une menace permanente sur un circuit où l'endurance prime souvent sur la vitesse pure.

L'ironie de la situation veut que Porsche, pourtant dominateur en IMSA avec des victoires aux 24 Heures de Daytona et aux 12 Heures de Sebring, peine à transposer cette réussite américaine sur le sol européen. Cette dichotomie interpelle et soulève des questions sur l'adaptation de la 963 aux spécificités du circuit français.
Les observateurs se souviennent que lors de l'édition 2024, malgré l'Hyperpole obtenue, Porsche était contrainte par des choix stratégiques discutables, notamment concernant les pneumatiques, combinés à une vitesse de pointe inférieure à Ferrari et Toyota. Des modifications hivernales ont été apportées au niveau des suspensions, mais suffiront-elles à combler l'écart ?
Crédit photo : Porsche / Geoffroy Barre