24 Heures du Mans 2025 : Ferrari, le favori

Après deux victoires consécutives sur les terres sarthoises, Ferrari semble avoir pris ses aises au Mans. Dans le paddock, on murmure avec révérence le nom de Ferrari. La Scuderia arrive avec l'aura du double tenant du titre et une série de trois victoires en Championnat du Monde d'Endurance qui la place naturellement dans le costume du favori. Pourtant, derrière cette évidence statistique se cache une réalité plus nuancée : les 24 Heures du Mans ne se gagnent jamais sur le papier, et l'histoire de cette épreuve mythique regorge de surprises qui ont fait basculer les pronostics les plus établis.

Le règne de Ferrari : une domination à relativiser

Ferrari débarque au Mans 2025 avec un palmarès impressionnant : double tenante du titre, trois victoires sur trois manches en WEC cette saison, et une 499P qui semble avoir trouvé la formule magique pour dompter le circuit de la Sarthe. La machine italienne impressionne par sa polyvalence. Comme l'explique Ferdinando Cannizzo sur le site officiel, le responsable des programmes d'endurance pour Ferrari : « Nous l'avons dessinée pour qu'elle soit compétitive au Mans ». Cette approche ciblée porte ses fruits depuis 2023.

50 ou 51, voire 83, quelle sera la 499P de pointe en 2025 ?

La 499P bénéficie d'atouts techniques indéniables. Son architecture « Hot V » avec les turbos logés directement dans l'angle du V6 offre une compacité remarquable, tandis que son système hybride permet le passage aux quatre roues motrices à partir de 190 km/h. Un avantage décisif dans les longues courbes du tracé manceau, comme le confirme Ye Yifei, pilote de la #83 : « Dans les virages rapides, comme dans les S Porsche, on peut économiser les gommes arrière, car le train avant emmène aussi la voiture ».

La fiabilité reste une épée de Damoclès, particulièrement pour la Ferrari #83 d'AF Corse qui joue souvent les lièvres avant de connaître des ennuis techniques.

Mais cette domination apparente cache quelques failles. La fiabilité reste une épée de Damoclès, particulièrement pour la Ferrari #83 d'AF Corse qui joue souvent les lièvres avant de connaître des ennuis techniques. De plus, malgré les déclarations de modestie d'Antonello Coletta qui affirme que « nous ne sommes pas LE favori. Nous ne sommes pas les plus rapides, nous faisons partie des plus rapides », le statut de favorite peut parfois peser plus qu'il n'aide dans la pression unique des 24 Heures.

Une concurrence redoutable aux aguets

Face à cette hégémonie italienne, plusieurs constructeurs fourbissent leurs armes avec des approches différentes. Toyota, éternel rival de Ferrari depuis le retour de la Scuderia en prototype, possède une GR010 Hybrid éprouvée et une expérience inégalée dans la gestion des courses d'endurance. Les Japonais savent qu'une stratégie patiente et une fiabilité à toute épreuve peuvent renverser les situations les plus désespérées.

Affinée, affûtée, la 499P est la plus impressionnante à regarder en détails

BMW fait également figure d'outsider crédible avec sa M Hybrid V8. Le constructeur bavarois progresse course après course. L'expérience du Team WRT, rôdé aux joutes internationales, constitue un atout précieux dans la quête d'un premier succès absolu au Mans pour BMW depuis 1999.

Alpine joue quant à elle la carte du patriotisme avec son A424. Sur ses terres, l'équipe française dirigée par Philippe Sinault bénéficie d'un soutien populaire qui peut transcender les performances pures. L'histoire du Mans regorge d'exemples où la motivation et l'émotion ont compensé un déficit technique. Les Bleus d'Alpine rêvent secrètement de marcher sur les traces de Pescarolo ou de Rondeau.

Déjà deux victoires en Sarthe, une statistique qui impressionne

Mais c'est peut-être Porsche qui incarne le plus grand danger pour Ferrari. Avec 19 victoires au compteur, le constructeur de Stuttgart connaît les arcanes de cette course comme personne. La 963 porte en elle l'héritage des mythiques 917, 956, 962 et plus récemment des 919 Hybrid qui ont dominé l'ère LMP1.

Contrairement à Ferrari qui a conçu une voiture spécifiquement pensée pour Le Mans, Porsche a développé une Hypercar plus généraliste, capable de s'adapter aux changements de conditions que réserve immanquablement cette épreuve de 24 heures.

Contrairement à Ferrari qui a conçu une voiture spécifiquement pensée pour Le Mans, Porsche a développé une Hypercar plus généraliste, capable de s'adapter aux changements de conditions que réserve immanquablement cette épreuve de 24 heures.

La #83, trouble-fête italien au service de Porsche ?

Paradoxalement, c'est peut-être Ferrari elle-même qui pourrait offrir à Porsche sa plus belle opportunité. La présence de trois 499P sur la grille, avec la #83 d'AF Corse en semi-équipe d'usine, crée une dynamique particulière. Cette troisième voiture « jaune » - ornée des couleurs de Modène - s'est souvent montrée la plus rapide en début de saison, mais aussi la plus fragile.

Robert Kubica, Ye Yifei et Philip Hanson forment un équipage séduisant sur le papier, mêlant l'expérience de l'ancien pilote de Formule 1, le talent du jeune Chinois et la régularité du Britannique. Mais cette Ferrari #83 pourrait jouer un rôle d'apprenti sorcier : en tentant de jouer sa propre carte, elle risque de fragiliser la stratégie globale de Ferrari et d'ouvrir des brèches que Porsche saura exploiter.

Avant Indianapolis, haut lieu de la magie mancelle

L'épreuve mancelle 2025 s'annonce comme un fascinant jeu d'échecs à huit joueurs, où chaque constructeur devra déployer sa stratégie pour détrôner un champion en titre qui n'a plus le droit à l'erreur. Ferrari arrive avec la confiance mais aussi la pression du favori, tandis que ses rivaux évoluent dans la liberté de ceux qui n'ont rien à perdre.

Au terme de ces 24 heures qui transforment les hommes et les machines en légendes, la hiérarchie pourrait bien être chamboulée. Car au Mans, comme le murmurait Enzo Ferrari lui-même, « l'automobile, avant d'être mécanique, est d'abord mystique ». Et dans ce temple de la vitesse, tous les mystères restent possibles.

Crédit photo : Ferrari

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